Quinzaine des fiertés 2023 à Saint-Denis

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Léo Pisu, stagiaire chargé de la lutte contre les discriminations LGBTQIA+ et Marie Leroy, chargée de mission Droits des femmes nous expliquent comment la Ville de Saint-Denis s’est engagée pour la lutte contre les LGBTQIAphobies et quels projets ont été menés dans le cadre de la première édition de la Quinzaine des fiertés.

Quelles formes a pris l’engagement de la Ville de Saint-Denis contre les LGBTQIAphobies, et quelle a été la genèse de sa mise en place ?

À Saint-Denis, aucun dispositif transversal, dans les différents services de la collectivité, ne visait spécifiquement les personnes LGBTQIA+ jusqu’à cette année. Pour autant, des structures et des actions de ce type existaient depuis longtemps sur le territoire. Prenant en compte cette spécificité, la Ville a organisé cette année la « Quinzaine des fiertés » du 17 mai au 3 juin 2023. Combinant des actions organisées par la collectivité et par des partenaires locaux, celle-ci s’est développée sur trois axes : la formation et la sensibilisation au sein des services, la sensibilisation des habitant·es, et le développement du maillage associatif et partenarial sur le territoire dyonisien. Cet engagement est également porté par des élu·es, et notamment Oriane Filhol, adjointe au Maire en charge des solidarités, de l’accès au droit, des droits des femmes, de la lutte contre les discriminations.

Comment ont été mises en place les différentes actions de formation lors de ces événements ? Avez-vous rencontré des obstacles pendant leur déroulement ?

Les associations locales ont beaucoup été sollicitées sur le volet formation. La première sensibilisation a été animée par deux médecines – Sophie Le Goff et Charlotte Mouton – formées par les associations OUTrans et Acceptess-T, faisant partie du Réseau de Santé Trans, et par une intervenante de l’association OUTrans lors d’un Midi Santé (événement organisé ponctuellement par la Ville pour ses agent·es). L’objectif est que davantage de Midi Santé soient consacrés aux enjeux LGBTQIA+, cela a pu être souligné notamment par les nombreuses demandes de ressources qui ont suivi ces interventions. Le public était constitué de professionnel·les de santé intéressé·es par ces sujets, il n’y a eu aucune opposition majeure, notamment car la participation était volontaire.

Une sensibilisation obligatoire pour l’ensemble des agent·es des services d’état civil de la Ville a également suivi. Celle-ci était particulièrement importante pour mieux traiter des questions de changements d’état civil ou de parentalités LGBTQIA+. Aucun propos discriminant n’a été tenu pendant la formation, mais il y a eu quelques remontées en amont de l’intervention. La DGA est intervenue en envoyant un mail de rappel sur le cadre légal à l’ensemble du service et a tenu à introduire la session de sensibilisation pour montrer l’implication de la collectivité.

Et sur le plan culturel ?

De nombreuses actions culturelles ont été organisées pour les habitant·es de Saint-Denis : avec la librairie La P’tite Denise pour une rencontre avec l’autrice Chloé Vivares, avec le cinéma l’Écran pour des projections et ciné-débats sur les représentations LGBTQIA+ dans la culture, et des ateliers participatifs de sérigraphie avec l’association féministe La Rage ont été organisé. Le public était majoritairement composé d’habitant·es du territoire et d’étudiant·es de l’université Paris 8 Vincennes Saint Denis. 

La collaboration avec différentes associations et collectifs s’est également manifestée via les expositions « PENSES BÊTES » et « QUEERSUPERPOWER » de la photographe Estelle Prudent, durant deux semaines sur les vécus des personnes LGBTQIA+ et racisées. Cette exposition a permis de créer un espace visible pour les dyonisien·nes, et notamment de mettre en place une permanence d’accueil et d’écoute qui a très bien fonctionné. Les entretiens menés dans ce cadre ont fait émerger des récits de violences vécues, et ont permis aux personnes d’être orientées vers des associations locales et les services psychosociaux municipaux. Cependant, nous avons tout de même constaté un véritable manque sur les ressources et les structures locales à mobiliser face aux violences LGBTQIAphobes, et nous avons constaté un manque de visibilité des événements organisés en dehors de l’exposition et de la Pride des banlieues ; la communication sur les réseaux sociaux d’Estelle Prudent a toutefois très bien fonctionné pour les ateliers et l’exposition. Le programme de la « Quinzaine des fiertés » a été diffusé via des flyers distribués au sein des services et des structures de la collectivité, et lors d’une campagne d’affichage en centre-ville et dans les collèges et lycées du secteur, mais cela a été insuffisant. Un levier identifié pour améliorer la communication l’année prochaine est une implication plus active des services de communication de la collectivité, ainsi que la mobilisation d’agent·es pour assurer une médiation sociale et culturelle auprès des habitant·es.

La Ville de Saint-Denis s’est également associée à la Pride des banlieues, qu’elle a subventionné via la direction de la Culture et la Maison de la vie associative. Le collectif organisateur et l’association qui lui a donné naissance, Saint-Denis Ville au Cœur, ont également assuré des formations pour les délégations d’élèves référent·es égalité dans les établissements scolaires dyonisiens. Le jour de la marche, un village associatif a été installé, où la collectivité a tenu un stand aux côtés du Conseil départemental de la Seine Saint-Denis.

Quelles sont les orientations et futures actions en matière de lutte contre les discriminations, et en particulier de lutte contre le LGBTQIAphobies à Saint-Denis ?

Sur le long terme, plusieurs objectifs ont émergé de cette expérience. Tout d’abord, l’obtention d’un local qui puisse être clairement identifié comme un lieu d’accueil et d’accompagnement sur les questions LGBTQIA+ par les personnes concernées sur le territoire dyonisien. Ce local permettrait de libérer la parole des habitant·es de manière pérenne et faciliterai la tenue de permanences pour l’orientation vers des partenaires spécialisés en cas de non-respect de leurs droits. L’idée serait également de multiplier les formations des agent·es et des partenaires de la Ville pour pouvoir développer davantage les spécificités liées à l’accueil et l’accompagnement des personnes LGBTQIA+. Enfin, des ressources sont à produire, notamment pour visibiliser les structures et les outils déjà existants sur le territoire et simplifier la communication à leur sujet.