Visuel décrryptage ORVF

Décryptage de l'Observatoire n°5 : Violences conjugales, où en est-on du suivi des agresseurs ?

Mis à jour le 20/04/2022

La Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence conjugale invite les États à appliquer des mesures législatives permettant des sanctions effectives, proportionnées et dissuasives de ces violences, mais aussi à mettre en place des dispositifs de suivi des agresseurs (article 16).

L’objectif de tels programme est de faire accepter aux agresseurs la responsabilité de leurs actes de violence, mais aussi de surmonter les conceptions qui tolèrent, justifient ou excusent purement et simplement la violence sexiste et sexuelle. Pour ce faire ces programmes doivent prendre en compte la sécurité des victimes et se faire en étroite collaboration avec les associations d’aide aux victimes.

 

Quels dispositifs existent aujourd’hui en Île-de-France pour le suivi des agresseurs dans le couple ? Ce décryptage fait le point sur la création toute récente fin 2021 d’un centre de prise en charge des auteurs de violences conjugales en Île-de-France, puis présente trois initiatives innovantes de prises en charge des agresseurs mobilisant les associations d’aide aux victimes et, enfin propose des ressources pour aller plus loin.

La création du centre de prise en charge des auteurs en Île-de-France (CPCA) début 2022

En 2021, dans le contexte de la crise sanitaire, des dispositifs nouveaux ont été mis en place par l’État en direction des auteurs de violences conjugales, notamment une plateforme de recherche de solutions d’hébergement coordonnée par le Groupe SOS, et le numéro d’écoute « Ne frappez pas » (08 019 019 11) géré par la FNACAV. En complément, le ministère en charge de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Égalité des chances a soutenu la mise en place, sur l’ensemble du territoire national, de centres régionaux de prise en charge des auteurs (CPCA). En Île-de-France, deux appels d’offre ont été lancés en 2020 et 2021. Deux projets ont été retenus : l’un porté par les associations ARILE et ESPERER 95, et l’autre par l’association Groupe SOS Solidarités et l’Association de Lutte contre les Violences conjugales (ALCV). Ces entités ont construit un projet de CPCA unique en Île-de-France.

FONCTIONNEMENT DU CPCA ÎLE-DE-FRANCE :

citation CPCA

Une demande de prise en charge est adressée au CPCA (par mail et/ou par téléphone) : en fonction de cette demande, un diagnostic peut être réalisé, puis une réponse est proposée en lien avec les ressources de proximité mobilisables, dont le CPCA assurera le suivi. Le CPCA n’a pas vocation à prendre en charge les situations, mais orienter vers les structures les plus compétentes : accès aux soins, insertion professionnelle, hébergement, etc. par un réseau de partenaires et d’associations de contrôle judiciaire au niveau départemental. 
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Exemple : le SPIP91 saisit le CPCA pour un auteur de violences de 50 ans, condamné à une peine d’un an et demi pour menaces de mort sur sa partenaire, pour le suivi après la sortie de prison prévue dans quatre mois. Le CPCA produit une évaluation, le rapport est transmis aux partenaires, et c’est l’association ACJE 91 qui assurera la prise en charge de l’auteur.

  • Un numéro de téléphone : 0176 504 504
  • Une adresse mail : contact@cpca-idf.fr
  • Un portail web unique sur la prise en charge des auteurs de violences conjugales : cpca-idf.fr

Bonnes pratiques en Île-de-France : implications des associations d'aide aux victimes de violences conjugales ou de prévention des violences sexistes et sexuelles

Plusieurs associations franciliennes ont mis à profit leur expertise dans l’accompagnement des victimes de violences conjugales et/ou de prévention des violences sexistes et sexuelles pour animer des séances innovantes auprès des agresseurs en questionnant leurs agissements au regard des stéréotypes et normes sexistes.

  • Le Centre d’information des femmes et des familles (CIDFF) 92 Nord organise des stages de responsabilisation depuis 2014. Un partenariat a été mis en place depuis 2014 afin d’animer des stages dans deux cadres : en mesure d’alternative aux poursuites décidées par le Parquet ; et dans le cadre post-sentenciel pour les agresseurs suivis par le SPIP 92. Chaque stage comprend 12h de participation obligatoire, pour des groupes non-mixtes composés d’hommes (qui devront payer pour ce stage). Ils sont animés par une juriste et une psychologue de l’association. Les stages sont articulés autour de trois piliers : l’aspect psychologique, l’aspect légal et l’aspect sociologique de violences conjugales.

L’objectif est aussi d’accompagner les agresseurs à prendre conscience du contexte social dans lequel s’inscrit ces violences, comme le décrit sa directrice, Blandine Barucq :

citation CIDFF 92 nord

Cette année, la demande de stages animés par l’association a doublé : 10 stages en alternative aux poursuites, et 6 stages en post-sentenciel (dont un en milieu fermé).

  • L’association Dans le Genre Égales organise des stages de responsabilisation en post-sentenciel à la demande de plusieurs SPIP depuis 2016. Chaque stage dure quatre jours et est composé de plusieurs ateliers animés par des professionnel·les (sociologie, art-thérapie, communication non-violente etc.). L’accent est mis, dans ces stages, sur l’importance de replacer les violences conjugales dans le cadre des inégalités entre les femmes et les hommes afin de prévenir la récidive de ces comportements violents en proposant d’autres façons de faire et de penser, notamment les relations entre les femmes et les hommes. >> Plus d’informations
  • La Maison des femmes de Saint Denis anime depuis deux ans des demi-journées dans les stages animés par les SPIP (93 et 95), à raison de cinq à six stages par an. Il s’agit de présenter à partir du travail quotidien de l’association la distinction entre conflit et violence conjugal, les manifestations du cycle de la violence et les conséquences des différentes formes de violences conjugales sur les victimes (la PMI intervient ensuite sur les conséquences sur les enfants). L’intervention est aussi l’occasion de questionner le seuil de tolérance des agresseurs à la violence et leur représentation du couple.